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Chronique cinéma


Décembre 2017

 par Lucie Poirier, journaliste-analyste

Le cinéma nous invite à s'esclaffer, à s'engager, à s'insurger, à s'informer.

01_le_suicide _Emma_PeetersEN PRÉPARATION

En 1978, couple à la ville et à l'écran, Élisabeth Huppert et Roger Coggio, tournait la comédie La belle emmerdeuse aussi intitulé On peut le dire sans se fâcher. Dans ce film, une femme, Pauline, organise son suicide mais, un immigré italien, Peppo, vient contrarier sa planification. Il fallait voir la scène de la mama engagée pour pleurer Pauline mais qui croit que c'est Peppo qui est mort et qui hurle de façon mémorable.

Ce sujet à la fois morbide et farfelu a encore inspiré une cinéaste.

Depuis le 7 novembre et ce, jusqu'au 15 décembre 2017, donc pour une durée de 28 jours, se déroule le tournage du film Le suicide d'Emma Peeters Forever Emma Peeters.  Pour le rôle principal, Monia Chokri, est à Paris et à Bruxelles. Cette comédie romantique est scénarisée et réalisée par Nicole Palo.

La proposition du film est audacieuse : « il faut mourir plusieurs fois avant de réellement pouvoir vivre ». Ainsi, une jeune femme rencontre un homme qui l'aide à réaliser ses intentions suicidaires. En effet, Emma, à 34 ans, est déçue de sa vie. Après 10 ans à Paris, elle n'a pas la carrière d'actrice qu'elle souhaitait. Elle veut mourir. Pour aboutir son projet, elle rencontre Alex qui travaille pour les pompes funèbres.

Pour entourer Monia Chokri, Fabrice Adde (Alex), Stéphanie Crayencour (Lulu), Andréa Ferréol (Bernadette),  Jean-Henri Compère (le papa d'Emma), Anne Sylvain (la maman d'Emma), Romain David (Bob),  Jean-Noël Delfanne (Serge), Hervé Piron (le shaman), Aran Bertetto (Pétrus).

Il s'agit d'une co-production Take Five de Bruxelles et Possibles Média de Montréal avec Serge Noël.

02_leonardo_dicaprio_titanicBEAU, TALENTUEUX ET ENGAGÉ

Depuis des mois, le beau et talentueux Léonardo DiCaprio s'est engagé à sensibiliser le public et, surtout, le gouvernement mexicain.

Leo, qui rendit célèbre la déclaration  « Je suis le roi du monde » à l'avant du Titanic dans le film de James Cameron, est encore dans des considérations maritimes. En effet, l'acteur veut que le gouvernement mexicain contribue à sauver la vaquita, le mammifère marin devenu le plus rare sur Terre. Cet animal est parmi les victimes de la pêche avec des filets maillants.

Il existe sur le site weroes.com une pétition pour contribuer à sauver ce type de marsouin dont il reste moins de 50 individus.

Quand une célébrité utilise sa renommée pour un noble projet, le rayonnement de la cause y gagne. En signant la pétition, vous serez parmi les gens qui, non seulement voient ses films mais, aussi, partagent ses convictions. Il y a toutes sortes de façons de faire partie du jet set.

03_les_complices_affiche_MasqueradeLES COMPLICES

Au Québec, après des années de silence, des allégations de pédophilie et le témoignage d'au moins une victime ont amené le retrait du nom Jutra pour désigner des prix, des salles, des rues, des places publiques. La réprobation a été immédiate relativement au cinéaste Claude Jutra.

En France, après des années de dénonciation, l'admission, par lui -même, de sa culpabilité dans un crime infligé à une mineure et incluant viol et sodomie (la fillette avait 13 ans), des témoignages de victimes âgées de 9 à 15 ans au moment des faits, le cinéaste Roman Polanski a été honoré (sic) par la Cinémathèque Française. L'approbation est effective dans son cas.

La différence de réactions peut susciter des questions incluant celle du genre des victimes : est-il moins grave de violer des fillettes que des garçons?

Dans le film à sketches, Histoires extraordinaires (1968), la 2e  partie s'intitule William Wilson et a été réalisée par Louis Malle. L'employé de la salle de jeux, qui a approuvé que Giuseppina soit dénudée et fouettée devant tous, déclare à Wilson : « Nous ne sommes pas contre certains plaisirs ».

La maltraitance féminine est un plaisir cautionné par diverses instances : psychiatrique, politique, judiciaire. Leurs stratégies favorisent la commission et la récidive de crimes dits sexuels :

Le rapport psychiatrique du montpelliérain Claude Aiguesvives stipulait qu'un jeune violeur n'était pas dangereux. Peu après, le garçon violait, tuait et brûlait le cadavre d'Agnès Marin, 13 ans. En 2015, la chancelière allemande Angela Merkel et la bourgmestre de Cologne Henriette Reker (qui a blâmé les victimes) n'ont ni démissionné ni été destituées après que 2 000 hommes préparés et coordonnés ont commis plus de 
1 200 viols lors de la St-Sylvestre. En 1998, la Cour supérieure du Québec accordait l'absolution inconditionnelle à Gilbert Rozon  dans un cas d'agression sexuelle après l'avoir condamné ;  depuis des plaintes ont à nouveau été déposées contre lui pour viols . À travers le monde, la gravité des violences sexuelles infligées aux victimes de sexe féminin est minimisée parfois même favorisée. Nous sommes une planète de détestation des femmes.

Le viol a été érotisé. Or, il n'implique pas les pulsions sexuelles, il concerne les pulsions agressives. Le viol n'est un acte de désir, il est une volonté de domination, et même de destruction; les problèmes de sidération psychique le prouvent, c'est un traumatisme à vie, non seulement pour le corps mais aussi une détérioration du cerveau comme l'indiquent des IRM. Dans le film Masquerade, (Bob Swain, 1988), Anne Briscoe prétend que Tony Gateworth ne peut pas avoir tenté de violer Olivia Lawrence puisqu'il ne l'aimait pas; le policier Mike McGill lui rétorque que le viol n'est pas une question d'amour.

Donc, les instances, qui reçoivent l'argent des contribuables, échouent à rendre justice, à dissuader les criminels, à protéger la population et à mériter la confiance du peuple. Les médias, pendant quelques temps, ont pris le relais : Mille milliards de dollars (Henri Verneuil, 1982) Le quatrième pouvoir (Serge Leroy, 1985) et d'autres films ont démontré que les médias pouvaient irriter, contrarier, les complices dans des affaires économiques. Mais, les médias sont devenus complices dans des affaires d'abus à caractère sexuel. Alors, des médias sociaux (l'expression des victimes du producteur Harvey Weinstein) et Anonymous (la dénonciation de la re-victimisation de Rehtaeh Parsons) cristallisent les espoirs des victimes qui ont besoin de verbaliser leurs tragédies, qui voudraient que les récidives soient endiguées. Vers qui, vers quoi, se tourner quand la parole est ignorée ou pénalisée? « À mal nommer les choses, on n'arrange pas les situations » dénonçait Albert Camus; à ne pas nommer les crimes, on ne les empêche pas.

L'identité masculine se résumerait à : « Être violeur, ou ne pas être ». Cette réduction du destin masculin ne me satisfait pas. Je constate que des hommes existent sans approuver le viol. Il leur faut assurément du courage pour assumer une telle dissidence quand circule l'idée que le viol d'une fillette, d'une grand-mère, d'une conjointe, d'une inconnue, d'une voisine, d'une collègue, d'une chercheuse d'emploi… est le plaisir de l'homme et que c'est «juste pour rire».

Avec arrogance, la Cinémathèque Française a organisé une Rétrospective/Hommage à Roman Polanski qui a fuit les États-Unis pour éviter l'appel du procès qui le concernait alors qu'il avait admis avoir violée une fillette de 13 ans. On prétend qu'il ne faut pas confondre l'homme et l'œuvre sauf que sans sa fuite, il n'aurait pas tourné autant de films.

Pour s'accorder avec la misogynie française, le Théâtre Outremont, au Québec,  projettera le film Le Bal des Vampires réalisé par Roman Polanski. Les projections sont prévues pour le 7 décembre à 18h et le 10 décembre à 15h. Il faut tenir à lui faire une place : présenter en décembre un film souvent projeté pour l'Halloween. Quel message est ainsi lancé?

La Cinémathèque Française prévoit pour janvier 2018 une exposition consacrée à un autre agresseur sexuel, le cinéaste Jean-Claude Brisseau. Il a profité de sa fonction de réalisateur pour exiger la soumission sexuelle de quatre jeunes actrices. De plus, les faits d'agressions sexuelles qu'il a infligés à l'actrice Julie Quere ont été établis par la justice française.

Le lundi 31 octobre 2017, lors de l'inauguration de l'événement consacré au cinéaste pédophile Polanski, deux idéalistes et justicières pacifistes, des Femen, ont fait preuve d'un courage rare et émérite avant d'être expulsées et insultées, elles ont scandé : «Pas d'honneur pour les violeurs».

04_la _raison_Etat EN SOUVENIR : LA RÉPLIQUE DU MOIS

En 1977, André Cayatte dédiait son film La raison d'état au biologiste Jean Rostand  qui voulait le désarmement. Les dialogues de Cayatte et de Jean Curtelin sont à la fois précis et ironiques. Ce film informe et fait réfléchir. Ses propos sont toujours actuels. Dans son scénario, original et instructif, Cayatte explique le processus par lequel la France peut fournir illégalement des armes à des pays en conflits sans être tenue responsable de ces ventes.

Le professeur Marrot, un biologiste, détient les preuves de ces tractations. Il découvre qu'un avion de la Croix Rouge avec 140 enfants africains a été  touché par des missiles français vendus à des rebelles. En Italie,  il en informe une collègue, Angela Ravelli. Ce personnage féminin est fascinant : interprété par la belle et talentueuse Monica Vitti,  Angela est une idéaliste proactive, une conférencière dans un congrès scientifique et une mère célibataire.

Dans une scène très tendre, Angela dit au professeur que chez elle,  elle a une photo de sa fille, de sa mère et de lui alors qu'il lui avoue n'avoir sur son piano, qu'une seule photo et qu'il s'agit d'un portrait d'elle.

Le professeur décide de quitter l'Italie pour faire savoir au peuple français le crime de guerre de son gouvernement. Après la mort mystérieuse de Marrot, Angela tente à son tour de révéler le scandale. Elle sera confrontée à des menaces qui seront sans effet sur elle, même si la raison d'état est brandie pour la dissuader.

Au cours de ses démarches, elle croise un des fonctionnaires responsables de la vente illégale des armes, Jean-Philippe Leroi. Après la mort des enfants, le Ministre s'était  précipité chez Leroi, inquiet que la responsabilité de la France soit connue. Leroi aussitôt lui avait déclaré (en toute hypocrisie) : «En France, on peut tout se permettre sauf une chose, toucher aux enfants».